Il existe, rue de l'Heystraete, derrière la ferme du "Colombier",
au lieu-dit du Nouveau Jardin, une motte, ceinte d'anciennes douves, vestige
féodal du château qui s'y trouvait. Il nous est représenté
dans l'ouvrage "La Flandre illustrée" qu'un chanoine d'Ypres,
Sanderus, réalisa vers 1641.
Sanderus eut un jour l'heureuse idée de parcourir la Flandre pour en
décrire les villes et châteaux. Il se fit accompagner par un excellent
dessinateur qui s'appelait Vedastus Du Pouich, originaire de Westoutre au pied
du Mont Rouge. Tandis que l'un décrivait, l'autre dessinait. Le résultat
de cette amicale collaboration fut un remarquable album illustré qui
avait pour titre : "Flandria illustrata - Flandre illustrée".
La première édition fut écrite en latin de l'époque
et la seconde en flamand.
Voici ce que Sanderus écrit sur Steenwerck et son château :
"Ce territoire a reçu le nom d'un ouvrage en pierre qui, autrefois,
y fut érigé. Il est situé non loin de Niepkerke (Nieppe)
et appartint récemment à Robert d'Estournel, qui était
banneret de la seigneurie voisine de Zoestestede (Le Doulieu) et qui était
maréchal de Flandre et un homme illustre de nom et de naissance, possédant
un pouvoir très étendu et de grands revenus dans ce pays."
"Plusieurs lettres publiques démontrent que ce fut une famille
très ancienne et noble qui porta le nom de Steenwerck."
Appelé "Château de Nieuwenhove" (nouveau jardin en français),
c'était la demeure de la famille "De Wulf" qui en était
alors propriétaire. Un illustre représentant de cette famille,
Jean De Wulf, fut grand bailli des villes et châtellenies d'Ypres en 1225
sous le règne de Jeanne De Constantinople, comtesse de Flandre. Mais
d'autres châtelains occupèrent le château jusqu'à
la révolution de 1789.
Cette demeure seigneuriale entourée d'eau, était précédée
d'une ferme avec un pigeonnier.
Cet édifice fut abattu, comme tant d'autres, à la révolution
française par les sans-culottes. Seul subsista une petite tourelle servant
de pigeonnier. Mais elle disparut dans les bombardements de 1918. Cependant
le site existe toujours et une ferme fut reconstruite sur le même plan.
C'était un domaine assez important, situé à
l'emplacement actuel du local-club. On nous le décrit entouré
d'un vivier où circulaient des cygnes.
Le Docteur VANUXEM qui y habitait était un "personnage" réputé
pour son parler patois. "Mène, viens rouler mes maronnes"
disait-il à sa bonne philomène avant de partir en visite par les
petits chemins boueux de la campagne.
A sa mort, il fit don de son "château" à sa bonne. Durant
la guerre 14-18, il fût le siège de l'Intelligent Service (service
d'espionnage anglais). Les gens qui souhaitaient passer en zone rouge devaient
y demander des laisser-passer spéciaux.
Le château fût totalement détruit en 1918.
De nombreuses églises furent érigées successivement à
l'emplacement occupé par celle que l'on connaît aujourd'hui. L'église
était dédiée à Saint Jean-Baptiste et appartenait
au doyenné d'Ypres, puis à celui de Warneton. En 1182, Mgr DESIRE,
évêque de Thérouanne confia la paroisse à l'abbaye
de Saint Jean-Baptiste, près de Choques.
Une église, qui fut dévastée par les "gueux"
(Calvinistes) en 1566 et qui brûla en 1601, remplaçait déjà
d'autres sanctuaires. En 1615, une nouvelle construction entame sa longue carrière.
Elle sera détruite en 1897 ; la toiture tombant en ruine (par deux fois
des plâtras et gravas tombent dans l'église en 1896), seul le clocher
fut épargné. Pendant une période, après la révolution,
elle abrita aussi des fêtes républicaines. Le Directeur de la Police
avait alors donné l'ordre de faire disparaître tout signe religieux
; l'administration municipale tourna la difficulté en divisant l'église
en deux parties séparées par un rideau (une pour les fêtes
laïques, l'autre pour le culte).
Une
autre église, bénit le 7 octobre 1900 par Mgr SONNOIS, apparaît
en 1899 (une église provisoire, élevée dès les premiers
mois de 1898, en bois assura l'office pendant la durée de la construction).
On y réutilisa certains éléments d'architecture de l'ancienne
église (une "hallekerque" à trois toitures) et on y
replaça l'ancien mobilier. Les travaux étaient dirigés
par monsieur l'architecte CROIN. La cloche de l'époque portait alors
cette inscription : "JAN suis nommée par Messire Pierre Philippe
DU CHASTELER, seigneur de Bavai, Oudeneen, Tar Wemandt, de la rivière
du lis, depuis le demy pont d'Estaires jusqu'au demy pont d'Armentières,
et Anne-Marie D'ESTOURNELLE, sa compagne, dame desdits lieux, lesquels m'ont
donnée à cette église. Guillaume ASSENT, pasteur".
Monseigneur Assent a été curé de Steenwerck de 1657 à
1670. Elle sera détruite lors des combats de septembre 1918. Une grotte,
reproduisant celle de Lourdes y était édifiée près
du clocher. L'ouvroir St-Joseph, restauré et agrandi à angle droit
par un baraquement, servit alors d'église provisoire.
C'est à la fin du mois de novembre 1923 qu'est posée la première
pierre de l'église actuelle, elle sera achevée au printemps 1928.
Les travaux sont dirigés par monsieur l'architecte LEHAY.
Ainsi, Steenwerck possède la particularité rare d'avoir eu trois
église en moins de quarante ans. L'église primitive de 1615, de
style gothique et construite en pierres extraites des carrières du Mont-Noir.
En 1898, ce sanctuaire ayant été jugé insuffisant et trop
peu décoratif, M. le chanoine BOUTTE, curé de la paroisse, le
fit démolir et reconstruisit une nouvelle église en conservant
l'ancien clocher. Les bombardements de 1818 l'anéantir. En 1923, la municipalité
de Steenwerck commença alors les travaux de reconstruction. Des modifications
importantes furent apportées à l'ancienne orientation. C'est ainsi
que, pour embellir le bourg, l'entrée de l'édifice fut placée
du côté diamétralement opposé, vers la nouvelle place
créée depuis la guerre. En même temps le bâtiment
était légèrement reculé pour dégager la façade
principale.
L'église actuelle, de style romano-byzantin, est une gracieuse construction
de cinquante mètres de long sur vingt-deux de large, bien proportionnée,
présentant, au-dessus du grand portail, une tour élancée
qui porte à cinquante et un mètres de haut un dôme elliptique
visible à dix kilomètres à la ronde. Les matériaux
utilisés sont la brique, la pierre blanche et le ciment pour réduire
au minimum les risques d'incendie.
Lors de son inauguration par Mgr JANSOONE, administrateur du diocèse
de Lille, et M. le Docteur DELANGLE, maire de Steenwerck, on y trouvait déjà
les quatre cadrans indiquant l'heure, une cloche logée à son emplacement
définitif, cinq merveilleux vitraux de choeur -imités de l'antique
décore- expliquant la vie de saint Jean-Baptiste -patron de la paroisse-,
une chaire en pierre reconstituée et émaillée de mosaïques.
Il ne manquait que le maître-autel et les orgues.
En 1812, la mairie, qui était au même endroit que maintenant,
avait des murs en torchis et une toiture en tuiles plates. C'est en 1852 que
l'on dresse les plans d'un nouveau bâtiment qui entrera en fonction en
1856. La prison, qui était jusque là située dans une pièce
("Baimmiu Kamer") au pied du clocher, y fut transférée.
Toujours existante malgré les guerres, son soubassement est en grès
provenant des carrières de Béthune, ses marches et appuis de fenêtre
en pierre de Tournai. L'entrée, surmontée d'un balcon, simule
une bretèche. Le "dépôt de pompes" et "les
poids publics" trouvèrent place aux extrémités.
C'est en 1045 que M. l'Abbé Lefrançois, alors curé de
la Paroisse, décida de fonder asile, devenu aujourd'hui la Maison de
Retraite de STEEENWERCK. A l'époque nombre de vieillards sans famille,
placés chez des particuliers menaient une exis-tence pitoyable. Il était
urgent de leur créer un abri, où ils recevraient, dans la tranquillité,
tous les soins nécessaires.
M. le Curé commença par chercher une maison. Sur sa demande, une
Bernardine, originaire de STEENWERCK, Dame Gé-rard, lui céda un
bâtiment qui pouvait servir d'hospice. A son tour, M. l'Abbé Six
fit don d'une pâture attenante à cette bâtisse. Restait à
trouver l'essentiel : des religieuses pour s'occuper des pensionnaires. Une
démarche tentée à Lille en ce sens, le 27.12.1848, aboutit
favorablement : deux filles de l'Enfant Jésus prirent en mains la direction
de la maison.
L'année 1852 vit la construction de la chapelle. Les frais en furent
couverts en grande partie par le produit d'une tombola : ce qui prouve bien
la sympathie de la population pour l'entreprise.
Cependant les charges se multiplient, M. le Curé, écrasé
par les soucis et les besoins d'argent, transmet, les bâtiments et tout
le matériel de l'hospice à la Commune.
Lors de la guerre 14-18, l'établissement est mutilé. Restauré
en 1922, il ne recouvre pas sa vitalité d'autrefois. Malgré d'indé-niables
bons désirs, malgré des efforts intermittents, l'oeuvre traverse
une période de quasi léthargie.
Elle est classée aux monuments historiques. Sa façade,
édifiée à la fin du XIXème siècle, fut l'uvre
d'un architecte (M. TIMMERY), de maçons et de tailleurs de pierre venus
de Bruges, ce qui était garant du plus pur style flamand.
Grand amoureux de la ville de Bruges où il avait des amis, monsieur Pierre
DUTRIE avait rêvé de posséder une maison dans le style architecturale
de cette ville. C'est au décés de sa mère, que monsieur
André DUTRIE en fit don à la commune.
A Steenwerck, on est tout particulièrement frappé par leur nombre
: 24 ! La plus ancienne chapelle de la commune est celle de "Notre Dame
de Confiance", rue des Hauts Champs. Elle aurait été édifié
par une mère dont les deux fils étaient partis participer aux
guerres napoléoniennes ; elle s'était faite la promesse de la
construire si elle pouvait les revoir. Mais un seul revint et la chapelle fut
édifiée en 1918.
Souvent, les chapelles actuelles n'ont été rebâties que
sur les cendres de leurs devancières.
Le quartier de la gare fut autrefois très animé.
Avant le développement des transports routiers, bon nombre de marchandises
arrivaient ou partaient : écume, charbon, graviers, bestiaux, pommes
de terre, engrais, vin, plantes (ets DUTRIE). Devant le café de la gare
se trouvait la bascule pour la pesée.
Jusqu'en 1930, un tramway faisait la navette entre Neuve-Eglise et la gare.
Utilisé en semaine par des ouvriers, surtout des mineurs belges, il était
complet le dimanche lorsqu'il y avait une fête à Neuve-Eglise.
Deux brasseries ont coexisté à Steenwerck : la brasserie PLOUVIER,
fondée en 1649, et la brasserie DEBERT, fondée en 1886. Les deux
familles furent concurrentes autant sur le plan commercial que politique lors
des élections municipales. La brasserie PLOUVIER, la plus importante
sans aucun doute, possédait une malterie et fabriquait aussi des alcools.
On y employait une bonne trentaine de personnes et 13 chevaux. La brasserie
DEBERT employait une dizaine de personnes et ne possédait que des mulets.